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[Cet article a été mis à jour le 6 novembre, avec de nouvelles informations santé]

 

Nous assistons depuis quelques semaines à la fleuraison de nombreux articles venant orner avec anticipation la tombe de l’open data français. Entre le retour de la question de la tarification des données, la fermeture de services basés sur des informations santé, et le remaniement d’Etalab, les pythies prédisent déjà la fin de l’aventure open data.
Certaines questions n’ont pourtant pas lieu d’être tandis que d’autres signes, parfois passés inaperçus, semblent plus préoccupants pour l’avenir. Puisqu’il semble d’actualité en période d’Halloween de jouer à se faire peur, si on développait de vrais arguments de préoccupations après avoir fait tomber les faux ?


L’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours- et la tarification des données
Le 17 octobre dernier, un article des Echos paraissait sous le titre : L’Etat pourrait renoncer à la gratuité des données publiques. Olivier Schrameck, membre de la commission sur la rénovation et la déontologie de la vie publique s’y interrogeait sur la pertinence de proposer gratuitement des données publiques en temps de crise.

Cet article largement cité a inauguré la saison d’écrits mortifères sur la future tarification des données, le conditionnel étant devenu affirmation par la force des reprises médiatiques.






La publication par Owni le jour même de l’écriture de ce billet nous épargne un fastidieux travail d’analyse des théories de développement des rumeurs avec les étapes de réduction et accentuation des propos. Owni pointe ainsi qu’Olivier Schrameck a soutenu en publique la gratuité des données, ce qui laisse supposer la retranscription d’une phrase sortie de son contexte dans l’article à la base du florilège médiatique. Le gouvernement a par ailleurs répondu le 31 octobre par un communiqué affirmant le maintien du programme d’ouverture de données gratuites.

La question de la tarification des données ouvertes ne semble donc pas se poser, ce qui aurait pu être une bonne nouvelle si seulement ce débat n’avait déjà été tranché en 2011 par la circulaire du 26 mai instaurant le principe de gratuité par défaut des données publiques.

Pour irriguer le moulin des controverses, nous pouvons néanmoins ajouter qu’il n’y a toujours pas eu de positionnement du gouvernement sur la question de l’extension de la gratuité des données à celles encore facturées sans justification évidente. La stratégie open data française devrait être dévoilée en fin d’année. (supprimer cette dernière phrase dans les citations pour alimenter d’autres rumeurs)


Etalab, soluble dans la modernisation de l’action publique
Cette semaine a également été marquée par le départ de Séverin Naudet, jusque-là directeur de la mission Etalab en charge de l’ouverture des données inter-ministerielles et de la plateforme nationale data.gouv.fr. Départ accompagné de l’abrogation de la mission Etalab par le Décret n° 2012-1198 du 30 octobre 2012 portant création du secrétariat général pour la modernisation de l’action publique.

Certains ont voulu y voir la fin de la mission open data du gouvernement. Celui-ci a pourtant indiqué maintenir le programme d’ouverture des données en plaçant l’open data sous la tutelle du nouveau service de modernisation de l’action publique. Nous avons déjà expliqué que nous souhaitions ce changement, sur notre blog ici et mais pour rappel. Ce remaniement était attendu et semble parfaitement opportun car pour envisager un développement ambitieux de l’open data en France :

  • Il est nécessaire de développer l’harmonisation des pratiques et standards de données par la collaboration
  • Il est donc nécessaire d’avoir une mission nationale enfin fédératrice
  • Il est nécessaire d’organiser les espaces d’échanges et de mutualisations pour le développement des initiatives
  • Il est donc nécessaire que la mission ne s’attache plus uniquement à sa propre ouverture mais également à une stratégie de développement national
  • Il est nécessaire de sortir les démarches d’ouverture d’une seule logique de publication de données en ligne
  • Il était donc nécessaire d’intégrer l’open data au sein d’une stratégie globale de modernisation de l’action publique en lien avec les systèmes d’information et de la communication.



En rattachant l’open data, jusque là élément expérimental isolé, à la direction interministérielle pour la modernisation de l’action publique, la France se donne les moyens de développer une stratégie globale, transversale et cohérente afin d’assurer la diffusion des pratiques.

L’objet du nouveau secrétariat général n’est pas sans rappeler les objectifs de la gouvernance ouverte avec ses notions d’évaluation et modernisation de l’action publique, ce qui procure l’avantage de proposer enfin une stratégie au-delà de la seule publication de données. Nous avions d’ailleurs appelé à ce repositionnement il y a presque un an.

Et malgré cet acte nécessaire à la pérennité de l’open data, des dérives politiques ont favorisé le relais de la fausse information sur la fin de l’open data en France, provoquant le déchaînement des réseaux. L’UMP publiait ainsi que « le gouvernement décide de diluer la politique de transparence et d’ouverture des données publiques (open data) engagée par Nicolas Sarkozy et François Fillon » invitant à considérer la fin de l’open data pour une actualité qui pourrait au contraire en marquer le début.




Les critiques récemment relayées semblent donc injustifiées et occultent les vraies questions. Il serait peu ambitieux de focaliser les débats sur la gratuité ou le statut d’Etalab et de s’estimer bienheureux d’en voir la continuité assurée. Aujourd’hui les attentes sont passées à un stade supérieur et parmi tous les enjeux (en terme de qualité, quantité, dispositifs autour des données, etc)… nous pouvons évoquer plus assurément un questionnement sur une volonté politique de l’extension des données ouvertes.


Le risque de tartufferie
Si ces derniers remaniements semblent de bon augure pour la pérennité des démarches, il serait encore prématuré d’y associer l’existence d’une réelle ambition pour faire de l’open data un levier de changement. Pour preuve, les conflits liés aux données fermées se multiplient et l’absence de soutien politique pour l’extension de l’ouverture à des données d’intérêt général, ou permettant réellement de rendre compte de l’action publique risque de confiner le mouvement français à une logique de publication de données gadgets.



La culture accessible à tous- sauf aux autres

Un premier sujet de déception porte sur la position du ministère de la Culture qui s’est récemment déclaré « favorable à l’ouverture des données culturelles dans un cadre d’exception ». Entendez : oui à l’Open data, mais sans toucher au cadre juridique actuel qui confère aux données culturelles le pouvoir de se soustraire à l’obligation d’ouverture.

 

Dans cette réponse publique à l’Assemblée Nationale, le ministère de la Culture et de la Communication rappelle qu’il participe très activement aux négociations européennes sur la révision de la directive portant sur la réutilisation des informations publiques. Il s’y est même montré favorable à l’élargissement du champ de la réutilisation des données aux musées, archives et bibliothèques, « dans la mesure où un régime spécifique leur serait appliqué ». Ce qui, une fois traduit en open data, revient à confirmer un lobbying français en faveur de l’exclusion des données culturelles du champs du droit d’accès à l’information publique en Europe.

Dans le domaine de la culture, le nouveau gouvernement semble donc être aussi peu disposé que l’ancien à faire preuve de volontarisme.

 


Une police bien gardée
Une autre source de questionnement quant à une volonté politique réelle sur l’extension de l’ouverture de données : une cartographie d’Owni qui identifie les préfectures ayant accepté de fournir aux journalistes l’effectif des polices municipales locales. Si la carte semble s’être enrichie depuis la parution de l’article, on y constate que de nombreuses préfectures refusent encore de fournir leurs informations publiques. Les villes et régions engagées dans des procédures d’ouverture de données n’ont pas de préfectures plus collaboratives que les autres. La Préfecture de Paris, qui a le mérite d’être la seule engagée dans une démarche open data, se cantonne malheureusement à publier la localisation des fourrières et commissariats et n’aurait, selon la carte, pas transmis les informations sollicitées par Owni. Même constat de rétention pour la Préfecture de Loire-Atlantique dont tous les niveaux de collectivités sont pourtant engagés dans l’ouverture de données avec un portage politique.


Information ultérieure à la rédaction de ce billet




Tartufferie open data: posture de communication sur la transparence tout en faisant entrave au droit d’accès à l’information publique. (ndlr. cette définition est probablement applicable à toutes les administrations engagées dans l’open data). Il va manquer quelques actes aux paroles pour convaincre d’un changement d’orientation.


L’accès aux soins pour les plus démunis- d’information
D’autres domaines semblent également confirmer un manque de volonté politique sur l’open data. A quelques semaines d’intervalle, deux services se sont vus interdire l’usage d’informations liées à la santé. S’il s’agit parfois d’informations pouvant sortir du cadre du droit à la réutilisation, ces deux événements interpellent néanmoins sur la nécessité d’un questionnement des pratiques de services publics qui ne sont, de toute évidence, pas à l’avantage des usagers.


Fourmisanté, lauréate du concours open data national Dataconnexions, réutilisait des informations publiques disponibles sur le site Ameli, géré par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Salariés. Le projet : développer un service permettant aux internautes de comparer les tarifs de consultation des médecins généralistes et des spécialistes sur une localité. Objectif : favoriser la diffusion d’information sur le coût de la santé afin de permettre à chacun de faire de meilleurs choix et des économies.





Le site a dû fermer son comparateur de tarifs médicaux après une mise en demeure de la CNAMS.
Un cas similaire de demande d’accès à ces informations avait déjà été traité par la CADA qui confirme la nature publique des informations sollicitées, tout en précisant que la liste des médecins comporte des informations à caractère personnel qui ne sauraient entrer dans le cadre d’une communication sans anonymisation <subtilité>malgré le fait que l’information soit effectivement disponible en ligne</subtilité>

Pour rappel, il est possible de réutiliser des données à caractère personnel (tels que le nom et numéro de téléphone d’un médecin ou autres professions libérales) s’il y a eu consentement de diffusion. Il serait possible de transposer ce droit aux usages externes mais ce n’est pas l’objectif de la CNAMS qui s’offusque selon Rue89 que les données présentes sur le site Ameli-Direct, « résultat d’investissement financier, matériel et humain substantiels » (ceux des services de l’Etat, donc), soient utilisées par fourmisante.com

Les commentaires des internautes sur l’article en disent d’ailleurs long sur le chemin culturel qu’il reste à parcourir pour rendre présentable la notion de réutilisation d’informations publiques en France, pourtant créatrice d’emplois notamment sur le projet Fourmisanté. La médiatisation de l’affaire a finalement poussé Marisol Touraine, Ministre de la Santé, à s’exprimer sur le sujet en ces termes selon Politis: « Il revient aux pouvoirs publics de rassembler ces informations sur les hôpitaux, pour les rendre plus accessibles et plus transparentes ».

« Aux pouvoir publics ».
Entreprises -créatrices d’emploi, certes mais entreprises avant tout: non gratae. Ce qui remet en question l’argument avancé de développement de l’innovation sur des données publiques lorsque de toute évidence cela reste perçu comme un dommage collatéral. Pourtant à travers la charte de déontologie signée par les ministres, chacun d’entre-eux s’engageait à développer transparence mais également mise à disposition des données. Tant que les intentions ne seront pas suivies par des actes, tous les doutes restent permis sur l’existence d’une réelle volonté politique.

Ce différend est rendu public le jour même où démarrent des négociations entre l’assurance maladie, les syndicats de médecins libéraux et les mutuelles complémentaires santé, pour tenter d’encadrer les dépassements d’honoraires médicaux. On estime entre 300 et 400 le nombre de médecins qui pratiquent des honoraires «hors normes» soit jusqu’à dix fois le tarif sécu. Et plusieurs milliers de médecins ont des dépassements qui posent des problèmes concrets pour l’accès aux soins. Reste, dans cette jungle tarifaire, à comprendre pourquoi la Sécurité sociale ne fait pas tout pour faciliter l’accès des assurés à une comparaison des montants des honoraires.

Source : Slate


Il semble que l’usage de données d’utilité publique comme moyen de pression et de négociation par certains corporatismes se fasse aujourd’hui avec le consentement des pouvoirs publics et au détriment des citoyens et usagers.Le constat est applicable à d’autres acteurs de la santé. Lire à ce sujet le pamphlet de la directrice de Fourmisanté qui dénonce un scandale français sur l’accès à l’information santé, devenu marronnier des médias par manque d’action politique.




Feu Dentistedegarde.net était un service santé basé sur des informations publiques devenues inaccessibles. Le service disponible pour la Loire-Atlantique proposait d’accéder aux coordonnées du dentiste de garde le plus proche en cas d’urgence. Il intégrait également les données ouvertes de Nantes Métropole pour offrir aux nantais un calculateur d’itinéraire intégré. Le CHU de Nantes renvoyait vers ce service depuis son site internet et dentistedegarde a reçu plus de 18 000 visites en moins d’un an. Selon les développeurs, des dentistes allaient jusqu’à mettre à jour leurs coordonnées via le site, conduisant à l’enrichissement de la base.
Un partenariat entre l’ordre des chirurgiens-dentistes de Loire-Atlantique et les développeurs permettait à ces derniers d’obtenir les informations sur les gardes en amont de la mise en place (pour adapter leur service) et en échange ils enrichissaient la base fournie avec la liste des numéros de téléphones de dentistes qui n’étaient pas renseignés initialement. Chacun y trouvait donc son compte.

En octobre dernier, l’ordre de loire-atlantique a indiqué aux développeurs qu’il devait cesser de fournir la liste des gardes pour la fin d’année 2012. Dans un article de 20minutes, il est en effet rappelé que le remaniement dans la diffusion des gardes a été demandé au niveau national et par le ministère de la Santé afin afin d’organiser une redirection générale vers le Samu pour qu’il procède à l’orientation des patients auprès des praticiens ou hôpitaux selon les besoins.

Face à ce constat, les développeurs n’ont pas jugé utile de renouveler les domaines et hébergements du site qui devaient être reconduits en octobre. Le service n’est donc plus disponible en ligne.

Paradoxalement, Jérôme Mousseau, Président de l’ordre départemental, explique dans une interview sur Sun que cette volonté de remaniement dans le traitement des informations répond à un manque d’informations sur le service de garde. « Beaucoup de gens ne savent pas qu’il y a un service de garde tous les dimanches matins et tous les matins des jours fériés ». On ne comprend pas bien comment supprimer l’information en ligne et la cantonner au 15 permettra au public de mieux prendre connaissance de l’existence de ces services.
Autre bémol à la stratégie: tout le monde n’appelle pas le 15 avant de se déplacer. Les infirmières du CHU de Nantes affirment que des patients qui auraient dû être orientés vers des praticiens finissent par engorger les urgences. Le système 15 focalise finalement l’effort sur le SAMU inondé d’appels de simple informations sur la localisation des gardes et sur les services hospitaliers tenus de gérer les cas des praticiens.

En 2009, Roselyne Bachelot, alors ministre de la Santé disait vouloir mettre 10 millions d’euros sur la création d’une plateforme internet et téléphonique visant à désengorger les centres 15. L’objectif du projet, qui n’a finalement pas été mis en œuvre, était de faciliter l’accès à l’information pas un dispositif spécifique plutôt que de faciliter sa dissémination à moindre coût. La mode était et semble rester à une gestion centralisée et à l’information téléphonique.
Mathieu Le Gac-Olanié, créateur de dentistedegarde.net regrette : « La suppression de notre service va vers une plus grande concentration des appels vers le 15 ou un passage direct aux services hospitaliers sans orientation. Notre service gratuit et accessible à tous proposait pourtant d’offrir une première information en répondant aux questions telles que le numéro des gardes. Il était facilement possible de rajouter une mention invitant à appeler le 15 avant tout déplacement. »

Dans l’interview sur SUN, l’ordre des chirurgiens-dentistes justifie le contrôle de la diffusion de l’information par une question de sécurité des praticiens dans un domaine « très féminisé ». Cela semble paradoxal avec la volonté de promouvoir l’existence des gardes d’urgence auprès du grand public mais nous pourrions entendre l’argument sécuritaire s’il ne perdait de la crédibilité au constat que les services publics eux-mêmes ont parfois des difficultés à accéder à l’information des gardes (des dentistes comme des pharmaciens). Il y a donc un réel problème de diffusion et accès des informations aux services d’urgence, au détriment même des services publics et des usagers.

ECOUTER L’INTERVIEW (commence à la 2eme minute)

 

La mise à disposition d’informations en ligne reste une solution négligée et synonyme de perte d’un contrôle toujours plus illusoire lorsque l’on pourrait au contraire explorer les pistes des nouvelles pratiques numériques pour tenter de résoudre des problèmes d’utilité publique.



Serons-nous tartuffés ?
S’il est encore trop tôt pour discuter de la stratégie open data du gouvernement, qui semble cependant se donner les moyens de pérenniser les actions, les quelques éléments de réponse et non-réponse des nouveaux dirigeants politiques sur les conflits d’accessibilité aux données pouvant provoquer débat ou interprétation semblent refléter une position résolument conservatrice. Il serait donc légitime de se demander si nous allons continuer d’assister à de l’open data gadget qui ne libère que les informations accessibles par ailleurs.

Toute les données ne sont pas bonnes à ouvrir largement mais pour celles considérées publiques, la loi garantit devrait garantir qu’elles soient accessibles à tous. Pour certaines données essentielles parfois hors-cadre du droit d’accès à l’information, une réflexion s’impose sur leur requalification. Des données dans le domaine de la santé, de la sécurité, de la culture et des finances sont notamment concernées.Des données des administrations mais également d’entreprises, associations et autres organismes qui détiennent aujourd’hui des informations d’utilité publique. Cela implique l’affirmation politique d’une volonté d’extension de l’ouverture.

Dans un contexte de forte pression fiscale et d’efforts demandés aux français, il paraît d’autant plus essentiel d’assurer la transparence de l’action publique et de garantir une action de qualité orientée vers l’usager. Une réflexion est donc indispensable pour définir le cadre de l’extension de l’ouverture et le délimiter.

Si l’open data ne devait libérer que des données consensuelles, sans remettre en question certaines pratiques, nous passerions à côté des objectifs et opportunités de ce projet social. Or cela requière du volontarisme politique qui fait encore cruellement défaut.

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Suite aux élections législatives du 17 juin 2012, le gouvernement possède désormais la majorité parlementaire nécessaire à la mise en œuvre de sa politique, notamment en matière d’ouverture des données publiques. Plusieurs éléments semblent propices au développement d’une politique nationale ambitieuse sur le sujet :

 

 

  • Fleur Pellerin, désormais Ministre Déléguée chargée des PME, de l’Innovation et de l’Économie Numérique s’était également positionnée en faveur d’une extension de l’ouverture des données tandis qu’elle dirigeait le pôle Société et Économie Numérique dans l’équipe de campagne de François Hollande, désormais Président
  • Enfin le premier acte du gouvernement, à savoir la rédaction d’une charte de déontologie pour les ministres, faisait déjà mention « d’une action déterminée pour la mise à disposition gratuite et commode sur Internet d’un grand nombre de données publiques »

 

Nous avons donc, pour la première fois au pouvoir, des responsables qui non seulement connaissent la définition de l’open data – ce n’était pas gagné – mais qui en plus ont développé des démarches d’ouverture dans leurs précédentes fonctions, apparemment convaincus de l’intérêt social et économique du sujet.

 

Or malgré ces expériences et notes d’intention, aucune stratégie gouvernementale n’a encore été dévoilée. Selon Itespresso, la feuille de route gouvernementale du numérique ne sera d’ailleurs pas établie avant la fin du mois et il reste beaucoup de travail. La stratégie à venir sera-t-elle réellement à la hauteur des attentes ?

De fait, si le gouvernement Fillon avait initié les démarches au niveau gouvernemental en créant la mission Etalab ainsi que le site data.gouv.fr en 2011, le chantier n’en est qu’à ses débuts en France et et de nombreuses questions se posent désormais, sur lesquelles le nouveau gouvernement devra prendre position.

Voici 20 questions liées au développement de l’open data en France et suggérées ou identifiées en ligne, notamment chez RegardsCitoyens, Silex, le Conseil National du Numérique ou sur ce blog.

 

 

  • Faut-il définir juridiquement le terme « donnée ouverte »?

Les caractéristiques d’une « donnée ouverte » ont été définies par un collectif de représentants des mouvements open-source et du droit d’accès à l’information aux Etats-Unis en 2007. La liste des 8, puis 10 critères d’une donnée ouverte sert de fil conducteur aux démarches en France mais à défaut de consensus sur un texte de référence, chacun adopte des critères plus ou moins proches des textes de base. Et finalement, qu’est-ce que l’open data ?

 

 

  • L’ouverture des données publiques doit-elle devenir une obligation légale ?

La loi de 1978 instaurant le droit d’accès aux informations publiques en France fait mention de mise à disposition de documents sur demande expresse. Mais l’open data va au-delà de l’obligation légale puisqu’il s’agit d’une démarche pro-active de publication de données brutes. Ce mode de publication doit-il désormais s’imposer juridiquement aux administrations publiques ? Et à toutes les collectivités ?

 

 

  • Faut-il imposer l’usage de certaines licences ?

En 2011, la mission Etalab a créé la Licence Ouverte. Avec l’ODbL, il s’agit des deux licences les plus utilisées pour l’ouverture des données en France. Faut-il pousser pour l’émergence d’une licence unique ou rester sur un libre choix mais dans ce cas promouvoir les licences libres faisant référence ?

 

 

  • L’Etat doit-il s’impliquer dans la standardisation des démarches ?

Malgré les avancées d’Etalab en matière de licence et normalisation sur les données interministérielles, les démarches des collectivités locales souffrent aujourd’hui d’une hétérogénéité pénalisant le développement de la réutilisation des données en France. Aucune action gouvernementale n’a été entreprise pour se rapprocher des démarches locales et faciliter la standardisation, actuellement organisée de manière spontanée par les collectivités.

Le mouvement d’ouverture en France manque de documentation. Aucun référentiel n’a été publié par le gouvernement, qui prendrait notamment en compte les bonnes pratiques en terme de formats, métadonnées, standards, anonymisation… qui paraît essentiel à la formation, à la simplification et au développement des démarches d’ouverture. Faut-il mutualiser les bonnes pratiques et développer les formations ?

 

 

  • Faut-il adapter le code des marchés public ?

Les modèles d’animations autour de l’open data, avec le développement des appels à projets, posent la question du mode de coproduction des acteurs publics avec les réutilisateurs de données. Certaines applications développées n’ont pas d’objectif de rentabilité ou pérennité de la part de leurs auteurs. Mais le code des marchés publics impose de déterminer les besoins à satisfaire avant de lancer un appel d’offres pour acquérir un service. Les développeurs (dont lycéens) ayant développé un concept original et n’étant pas en capacité de répondre à l’appel d’offres ne pourront donc pas profiter de la vente de leurs créations. Faut-il adapter le code des marchés publics afin de favoriser la flexibilité et réactivité du secteur public face aux nouvelles pratiques ?

 

 

  • L’open data doit-il s’étendre au texte ?

Aujourd’hui les démarches d’ouverture concernent essentiellement les bases de données chiffrées et cartographiques. Or dans le droit d’accès à l’information, les rapports, dossiers, études, circulaires sont également concernés. Le travail de RegardsCitoyens sur les informations de l’Assemblée Nationale représente un exemple d’utilisation de « données textuelles » permettant de développer informations, statistiques et usages à partir de rapports qui gagneraient à être ouverts et structurés de manière élargie. Les démarches d’ouverture des données doivent-elles s’étendre aux données textuelles et à un travail de structuration de ces données ?


 

  • Les données culturelles doivent-elles êtres soumises au droit d’accès ?

Selon la loi de 1978, les informations créées par les établissements culturels, de l’enseignement et de la recherche jouissent d’un cadre dérogatoire. Elles ne sont pas soumises au droit d’accès à l’information tandis que les raisons de leur statut d’exception ont été démontées une par une dans l’excellent article de Lionel Maurel. Faut-il imposer l’ouverture des données culturelles ?

 

 

  • Faut-il revoir le droit d’auteur des agents publics ?

Certaines données collectées dans le cadre d’une mission de service publique sont soumises aux droits d’auteur des agents et donc souvent exclues des démarches d’ouverture de données. Ce droit d’auteur est-il toujours justifié ?

 

 

  • Faut-il moderniser la CADA ?

La Commission d’Accès aux Documents Administratifs a été créée en 1978 pour assurer la bonne application du droit d’accès à l’information publique. Elle n’a pourtant aucun pouvoir d’injonction, et malgré son avis favorable, les administrations ne sont pas contraintes de publier les informations publiques sollicitées via la CADA. Faut-il réformer son statut, augmenter ses pouvoirs ?

Parallèlement, la circulaire Fillon du 26 mai 2011 tout en instaurant le principe de gratuité des données rajoute que les informations pouvant être soumises à redevance doivent être au préalable inscrites sur une liste fixée par décret et après avis du COEPIA. Cette mission doit-elle rester une action COEPIA ou faut-il centraliser la thématique sur la CADA en étendant ses actions ?

 

 

  • Faut-il réaffirmer l’obligation de la publication des répertoires ?

L’article 17 de la loi de 1978 impose déjà aux acteurs publics la constitution d’un répertoire des informations publiques qu’ils produisent ou détiennent. Dans les faits, cette loi est rarement appliquée et ces répertoires se constituent à travers les démarches d’ouverture mais ne sont pas publiés. Or ces registres permettraient d’orienter les demandes d’accès en faisant état de l’existant. Pour soumettre une demande d’accès auprès de la CADA, il est également nécessaire de citer le nom de la donnée ainsi que de son détenteur or il n’y a aucune visibilité sur qui fait et possède quelles données au sein des administrations publiques, pénalisant l’accès à l’information. Faut-il engager un effort général sur la publication des répertoires ?

 

 

  • Faut-il focaliser le développement de l’ouverture sur les données disponibles ?

Les démarches d’ouverture s’orientent sur la publication de données facilement disponibles plutôt que sur les demandes. Il s’agit pourtant de l’un des objectifs de l’open data que de répondre aux demandes d’accès. Pourquoi ne pas ouvrir prioritairement les données suscitant le plus de demandes notamment auprès de la CADA ?

 

 

  • Faut-il définir une liste des données d’intérêt général soumises à publication obligatoire ?

Certaines données d’intérêt publique sont détenues par des délégataires de services publics, organismes privés et associations qui ne sont pas soumis à une obligation de publication. Cette barrière à l’accès oblige les citoyens à s’organiser pour reconstituer des bases pourtant existantes et d’intérêt public, telles que les informations nutritionnelles des produits de consommation courante. Faut-il imposer la publication obligatoire de données essentielles ? De même pour les collectivités, faut-il imposer une liste a minima de données essentielles à ouvrir ?


 

  • Faut-il étendre le devoir de publication aux organismes privés et civils ?

Certains organismes et structures sont déjà soumis au devoir de publication mais pour des cas très spécifiques (traçabilité sanitaire, financière, rapports de Responsabilité Sociétale des Entreprises…) Faut-il étendre ce devoir de publication, notamment aux structures financées par l’acteur public ? Et dans cet objectif de diffusion et accessibilité des informations publiées, faut-il intégrer les notions de données et contenus ouverts dans ces publications ?


 

  • Faut-il modifier le statut d’Etalab ?

La mission Etalab a été créée en février 2011 par un décret de François Fillon qui plaça à sa direction son conseiller multimédia, Séverin Naudet. Faut-il changer le directeur dont la démission avait été demandée, notamment pour attaques et non-respect du devoir de réserve durant les élections ?

Etalab, en charge de l’ouverture des données interministérielles et du site data.gouv.fr, est une mission actuellement rattachée au Secrétariat Général du Gouvernement. Le champs d’actions de la mission n’implique-t-il pas un rapprochement vers d’autres services tels que la modernisation des services publics actuellement en remaniement ?


 

  • Faut-il upgrader data.gouv.fr ?

Les données actuellement disponibles sur data.gouv.fr souffrent d’une qualité parfois médiocre, budgets publiés en .jpg, données sur les marchés publics erronées, liens html des sites présentés comme des données ouvertes… Faut-il continuer à publier de nouvelles données ou corriger l’existant, les deux à la fois ?

 

 

  • Data.gouv.fr a-t-il vocation à accueillir les données de toutes les collectivités ?

Bien qu’Etalab ait indiqué mettre data.gouv.fr à disposition des collectivités, seules les collectivités UMP ont à ce jour rejoint la plateforme nationale. L’une des problématiques évoquées pouvant être l’utilisation de la licence ODbL par les collectivités locales. La plateforme nationale aura-t-elle vocation à référencer toutes les données et sous différentes licences ?

 

 

  • Faut-il faire des données un outil de débat démocratique ?

Malgré les annonces politiques, peu de données inédites ont actuellement été publiées et rares sont celles pouvant susciter débat. Au vu des animations engagées, l’open data sert surtout d’appui à l’innovation plutôt qu’à la transparence et inclusion des citoyens. Faut-il développer ce volet de l’open data ou se focaliser sur l’innovation ?

 

 

  • La notion de Gouvernance Ouverte doit-elle faire partie du vocabulaire politique ?

Les bénéfices d’une démarche d’ouverture de données ne peuvent être atteints par la simple publication de données en ligne. Ce sont de nouveaux outils, de nouvelles pratiques et modes d’animation que l’administration doit développer au-delà de l’open data pour générer l’innovation et la participation pourtant convoquées dans les discours. Les démarches en France dissocient l’open data de l’open gov quand les fondements sont liés. Faut-il commencer à évoquer l’ouverture des données à travers un projet global et stratégique ?

 

 

  • La France doit-elle rejoindre l’Open Government Partnership ?

L’OGP est une initiative multilatérale qui réunit aujourd’hui plus d’une cinquantaine de pays impliqués dans des pratiques de gouvernance ouverte et de développement des démarches d’ouverture de données publiques. La France n’a jusque là jamais souhaité rejoindre ce groupement, espace d’échanges de méthodologies et bonnes pratiques entre pays impliqués dans l’open data. Faut-il rester à l’écart des mouvements internationaux ?

 

 

  • Faut-il être cohérent dans ses positionnements ?

Access Info Europe avait adressé au gouvernement français, début juin, une invitation à se prononcer en faveur de la transparence et du droit d’accès aux documents de la Commission, du Parlement et du Conseil Européen. La France s’étant en effet illustrée par son positionnement sur l’inclusion de cadres d’exceptions et de restriction d’accès à l’information.

Il semblerait que le nouveau gouvernement soit sur cette même lignée de restriction…

 

Le gouvernement va-t-il réellement développer une stratégie ambitieuse en matière de développement de l’open data en France ou adopter une posture ? La question restera ouverte jusqu’à la publication de la feuille de route pour peu qu’elle soit précise sur les positionnements, étapes et délais.


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Le choix d’une licence de réutilisation à apposer aux données ouvertes est l’un des premiers choix politiques d’un programme d’ouverture de données publiques. Il s’agit de conditionner les droits et devoirs associés à la mise à disposition et à la réutilisation des données.

Tandis que certains pays légifèrent pour créer une licence unique de réutilisation, l’entrée tardive de l’état français dans le mouvement Open Data a obligé les collectivités ouvertes à improviser sur le sujet.

Si ces dernières communiquent entre-elles sur les retours d’expérience et la mutualisation de procédures d’ouverture, l’absence d’une licence juridique de référence leur impose de répéter individuellement un travail juridique complexe et chronophage qui consiste à effectuer un comparatif des licences possibles avant de faire un choix basé sur le projet et contexte politique local.

Le manque de standard a donc généré l’utilisation et la création de licences diverses, pénalisant la lisibilité d’usage et l’interopérabilité des données. Ainsi Montpellier et Bordeaux ont opté pour les CGR de l’APIE, Rennes en a fait une adaptation et Paris a choisi l’ODbL.

Pourquoi n’y a-t-il pas de consensus en matière de licence ?

Le contexte législatif

Extrait du volet juridique du Guide pratique de l’ouverture des données publiques territoriales (FING)

En France, la loi encadre la réutilisation des données publiques en précisant les droits et obligations des acteurs publics comme des réutilisateurs. Ainsi, la loi CADA de 1978 exige, sauf consentement explicite, que les réutilisateurs :

  • Indiquent la source des données
  • Indiquent leur date de mise à jour
  • Respectent l’intégrité des données

En cas de mise à disposition de données sans notification de licence, c’est cette loi et ces devoirs qui s’imposent par défaut.

Les licences actuellement utilisées en France

L’Agence du Patrimoine Immatériel de l’État a été chargée de rédiger des licences de réutilisation pour les données publiques. Partant du principe que si les collectivités ne souhaitaient pas tarifer les données, les droits et devoirs liés à la loi CADA se substituaient à une licence, l’agence n’avait tout d’abord développé que des licences payantes.

Cependant, lorsque Rennes décida en 2010 d’ouvrir ses données pour des réutilisations gratuites, la ville souhaita y associer une licence. Ce n’est pas une obligation légale mais cela rassure les juristes et facilite la compréhension d’usage pour les réutilisateurs. C’est donc suite à ces échanges avec Rennes que l’APIE finit par rédiger une licence de réutilisation gratuite (les Conditions Générales de Réutilisation de l’APIE) qui est en fait une retranscription des conditions légales définies dans la loi CADA (impératifs de source, date, intégrité).

Bordeaux et Montpellier utilisent la licence CGR pour la mise à disposition de leurs données mais le positionnement initial de l’APIE sur leur tarification a nuit à l’image de l’agence et de ses licences auprès de la communauté du libre.

Problématique

Un flou juridique semble planer sur les CGR de l’APIE qui ne seraient pas compatibles sur les projets libres de type OpenStreetMap dont on sait le potentiel de valorisation de données.

« À la question de savoir si l’usage d’une licence du type APIE permettrait ensuite la réutilisation des données au sein du projet Open Street Map (sous ODbL), la réponse risquerait d’être négative 1) si la licence de l’APIE contenait des obligations à la charge de l’utilisateur différentes de celles contenues dans la licence ODbL ou 2) si les bases de données ouvertes étaient originales (donc objet de droit d’auteur) ou conséquentes à un investissement (donc objet du droit sui generis des bases de données), car l’ajout de la licence ODbL à ces bases nécessiterait qu’il y ait en amont une cession de droits adaptée.

Elles ont cependant pour inconvénients d’être franco-françaises (et donc incompatibles à l’international) et inspirées des modèles de contrats administratifs qui sont peu adaptés à des utilisateurs standards (notamment du fait du renvoi à d’autres textes). Au surplus, elles présentent pour défauts rédhibitoires (sources d’insécurité juridique) 1) d’être principalement axée sur la diffusion des données et non sur l’échange et la construction de services qu’une diffusion libre pourrait offrir, et 2) surtout d’être uniquement construite sur la base de la Loi du 17 juillet 1978 et de ne pas du tout prendre en compte les différents droits de propriété intellectuelle que la collectivité ou l’administration pourraient détenir sur ces bases. »

VeniVidiLibri : Les enjeux relatifs au choix de la licence

Alors que Rennes utilisait initialement les CGR pour la mise à disposition de ses données, la ville a ensuite développé une licence « Rennes Métropole en Accès Libre » afin de répondre aux attentes des libristes qui estimaient que les CGR de l’APIE n’étaient pas compatibles avec les projets libres (Wikipedia, Openstreetmap, etc.) notamment du fait de la mention « non altération des données » qui semble très floue. Une simple traduction d’une base de données en anglais pourrait être considérée comme une altération ?

D’où la rédaction de la licence Accès Libre qui comprend les mentions suivantes:

Les droits octroyés concernent :

  • L’extraction et la réutilisation de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu
  • La création de bases de données dérivées
  • La création de bases de données collaboratives
  • La création de reproductions temporaires ou permanentes, par tous moyens et sous quelque forme que ce soit, en tout ou en partie, y compris de toute base de données dérivée ou en tant que partie d’une base de donnée collaborative
  • La distribution, la communication, l’affichage, la location, la mise à disposition ou la diffusion au public, par tous moyens et sous quelque forme que ce soit, en tout ou en partie, y compris de toute base de données dérivée ou en tant que partie d’une base de données collaborative.

La licence rennaise est donc une adaptation des CGR de l’APIE auxquelles ont été ajoutées des mentions sur les droits associés afin de la rendre compatible avec les projets libres. Si l’on peut regretter que cette licence ne soit pas non plus reconnue à l’international, limitant la compilation avec des données étrangères, des doutes semblent encore subsister sur la compatibilité avec les projets libres.

  • La licence ODbL

Tout en respectant les droits et devoirs du cadre légal, les producteurs de données peuvent en effet orienter des choix plus précis (conditions en matière d’intégrité des données, d’identification de la source, etc.) et intégrer des variantes.

Ainsi à Paris, c’est la licence libre ODbL, développée initialement par Opendatacommons et traduite en français par VeniVidiLibri, qui est associée aux jeux de données. Elle ne se soustrait pas au droit français (droits et devoirs de la loi CADA repris dans les CGR de l’APIE) mais y ajoute au contraire des éléments.

L’ODbL met en œuvre la notion de copyleft. Le copyleft comme le copyright définissent et encadrent les droits des utilisateurs de façon contraignante. Le mécanisme est identique, mais les objectifs différents : le copyright garantit exclusivement les droits de l’auteur, le copyleft s’attarde tout particulièrement aux droits des utilisateurs, et vise à préserver la liberté d’utiliser, d’étudier, de modifier et de diffuser des bases de données et leurs versions dérivées.

L’ODbL impose que toute base de données dérivée soit maintenue sous la même licence, c’est à dire libre: accessible, modifiable et réutilisable par tous.

La licence OdbL crée donc un pot commun dans lequel s’ajoutent les contributions réalisées sur les bases de données libérées et participe à l’enrichissement collectif du travail plutôt qu’à l’appropriation individuelle. Une solution qui impose ce qui est au cœur de la démarche des logiciels libres : le partage à l’identique, c’est-à-dire le fait d’ouvrir à nouveau, et à tous, ce qui a été produit en reversant cette valeur ajoutée dans le pot commun.

En utilisant cette licence libre, les détenteurs de données imposent un devoir de contribution collective aux réutilisateurs. L’usage des données publiques est alors orienté non seulement vers l’innovation mais vers l’innovation sociale et la production de biens communs.

« Lorsque des administrations optent pour des licences interdisant les usages commerciaux, elles font le choix de se couper des projets emblématiques libres (Wikipedia, Open Street Map). Elles ne se donnent pas la chance de profiter de la visibilité offertes par ces sites (150 millions de visiteurs uniques pour Wikipédia). C’est d’autant plus dommageable que le travail effectué par ces communautés pourrait constituer un atout majeur pour les données publiques. En rendant accessible les données cartographiques à tous et sans discrimination, OpenStreetMap propose une alternative plus que crédible face aux services de cartographies publiques. Faire le choix d’être incompatible avec leurs licences pourrait être interprété plus que négativement par ces communautés. Ainsi, alors que l’Open Data vise à rapprocher les citoyens de leurs administrations, le choix d’une clause restrictive aurait plutôt tendance à les éloigner. » RegardsCitoyens

Sans licences libres pour les données publiques, des projets tels qu’OpenstreetMap, dont l’utilité sociale est reconnue par les Nations-Unis, et dont la qualité et les données sont souvent plus riches que Google Maps se verrait donc mis à l’écart par l’Open Data.

Pour soutenir l’usage des licences libres associées aux données publiques, Creative Commons, OKF, RegardsCitoyens et VVL ont publié un appel aux données libres dans lequel ils indiquent:

« Toute licence introduisant des limitations ou des discriminations à l’accès aux données ou des restrictions sur leur reproduction ou redistribution à des fins commerciales ne doit pas être considérée comme une licence Open Data, et cela en conformité avec ce qui a été préalablement établi par OpenDefinition.org. Actuellement, en France, seules certaines licences utilisées par les administrations publiques satisfont ces critères et nous recommandons donc le choix de ces licences libres. »

Vous pouvez soutenir les licences Open Data libres en signant cette pétition.

L’importance du cadre juridique

Les licences franco-françaises s’additionnent donc tandis que la communauté de réutilisateurs ne reconnaît pas leur potentiel de libération des données. N’étant pas juriste, on se gardera bien de statuer sur la validité ou non de ces licences , ce qui est sûr en revanche c’est que leur dénombrement et leur non-reconnaissance est un frein en soi à la valorisation des données.

« Un cadre juridique n’est pas seulement là pour protéger mais aussi pour faciliter la rencontre entre le détenteur des données et ses réutilisateurs. Ainsi, un cadre trop restrictif peut conduire à une valorisation des données médiocre voire, nulle. Un cadre trop imprécis peut créer de l’incertitude. Un cadre très précis mais incompréhensible par des non- spécialistes chassera les petits acteurs, souvent les plus innovants… »

On le voit, le choix d’un cadre juridique a donc un impact réel sur le succès des usages de données publiques.

La licence nantaise

La ville et communauté urbaine de Nantes terminent actuellement leur travail de comparaison des licences juridiques applicables pour la mise à disposition des données nantaises.

Dans la continuité de l’ouverture participative de la ville avec les acteurs, nous avons eu une réunion sur le volet licence, durant laquelle nous avons rappelé notre « idéal de licence »:

– Que l’accès et la réutilisation des données publiques soit gratuite, y compris à des fins commerciales, ceci afin d’assurer leur accès à tous, favoriser leur réutilisation ainsi que le développement des porteurs de projets y compris les petits porteurs.

– Que les données soient réutilisables sur des projets libres tels que Wikipedia et Open Street Map qui développent les biens communs en ligne et dont les contributeurs nantais soutiennent l’open data sur le territoire.

– Que la licence soit claire, compréhensible par tous, associée à la plus large réutilisation et donc reconnue à l’international.

Nous avons également précisé que la licence choisie serait très probablement temporaire car les collectivités ont tout à gagner (et attendent même) la création d’un standard sur les licences.

Le choix nantais sera rendu public dans quelques jours, peut-être à l’OpenDataQuiou où vous êtes invités à nous rejoindre si vous passez sur Nantes.

Et demain ?

L‘idée d’une licence européenne semble faire son chemin mais la mission Etalab, chargée de la création du portail unique interministériel des données publiques, travaille actuellement avec l’APIE sur la création d’une nouvelle licence pour le futur portail national data.gouv.fr

Celle-ci pourrait devenir le standard attendu en France pour peu qu’elle réponde aux attentes de gratuité, lisibilité, compatibilité projets libres et cadre international.

Réponse en septembre.

 

[MAJ: Nantes a choisi la licence ODbL, tout comme Paris, CG33/Aquitaine, Brocas]

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Quelques liens de veille sur la thématique Opendata pour ce début d’avril…


FRANCE

Etalab

Dès sa sortie en décembre 2011, la plateforme nationale «data.gouv.fr » offrira la possibilité aux collectivités territoriales de publier leurs données grâce à un espace dédié.

Etalab a également prévu d’organiser des workshops et hackathons pour faciliter les échanges avec la communauté des développeurs.

Brest

Accroche paradoxale pour une ville engagée de longue date dans le développement des biens communs et de l’accès à l’information publique. Mais c’est désormais une démarche officielle et complète puisqu’après la libération de ses données géographiques en 2009, Brest Métropole Océane vient de nommer un référent opendata qui sera notamment en charge d’élargir les thématiques de données accessibles, au delà des données géographiques.

Rennes

  • Rennes a primé les applications de son concours

Parmi les gagnants : http://www.handimap.org/ qui répertorie toutes les informations utiles sur l’accessibilité ou www.arret-public.fr moteur de recherche unique pour les bus et le métro, avec indication de correspondances, points d’achat de billets, informations en temps réel, etc.

Avec la liste de ses comptes administratifs 2008 et 2009 et de ses budgets primitifs 2010 et 2011 en ligne ici. A cela, vient se rajouter un second jeu de données lié aux budgets annexes renseignant sur les dépenses en eau, en assainissement et autre chauffage urbain. Un troisième jeu concerne les subventions apportées aux associations.

Montpellier

  • Ouverture très prochainement

Montpellier teste sa plateforme de données publiques en accès privé. L’ouverture officielle prévue dans quelques semaines.

Nantes

  • Lancement de l’opendata sur Nantes

Nous organisons le 22 avril à la cantine numérique nantaise une journée de lancement de l’opendata sur Nantes. Pourquoi « lancement » alors que les démarches ont commencé il y a quelque temps déjà ? Parce que pour la première fois nous souhaitons réunir ensemble différents types de valorisateurs (chercheurs, étudiants, développeurs, journalistes, etc)  au lieu de faire des sessions séparées. Parce que pour la première fois nous faisons venir des intervenants pour les former sur des thématiques précises. Parce que pour la première fois, notre M. Opendata viendra s’exprimer sur le plan d’ouverture de la ville… Transversalité, dialogue, coproduction: c’est le début de l’Opendata !

Toulouse

  • Des citoyens toulousains s’emparent de l’opendata

Ils lancent une lettre ouverte à l’attention de leurs élus.

Cliquer ici pour signer la lettre en soutien au mouvement d’ouverture sur Toulouse.

Roubaix

  • On débat sur l’opendata

La fête de l’Internet roubaisienne semble avoir fait une place à l’opendata dans le nord. Alexandre Desrousseaux et Emmanuel Vandamme y plaident pour l’ouverture des données publiques.

Régions: Ile de France et Rhone-Alpes

  • Des démarches en cours

@choblab mentionne que la région Ile de France est bien sur la question de l’opendata, et quelques rumeurs sur des avancées en région Rhône Alpes également.

Bientôt une mise à jour de notre carte contributive de l’opendata en France. N’hésitez pas à y poster vos liens vers des articles mentionnant de nouveaux acteurs.

Et aussi

  • Lancement de DataPublica

Le 22 mars dernier avait lieu le lancement officiel de Data Publica. Voir les différentes étapes techniques qui doivent permettre à Data Publica de s’imposer comme le portail et la place de marché de référence des données en France.

     

  • La transparence fait son chemin

Signe que la transparence est d’actualité, les députés autorisent la publication des comptes rendus de comités secrets… datant de 1870.

ETATS-UNIS

  • Datagov va-t-il fermer ?

Grande polémique des deux dernières semaines, les Etats-Unis envisageraient de fermer la plateforme nationale de mise à disposition de données publiques data.gov ainsi que sept autres sites associés de gouvernement ouvert. Ce sont des coupes budgétaires drastiques qui menacent le site.

Une proposition de budget pour l’année fiscale 2011 émanant de la chambre des représentants est actuellement en négociation au Sénat. Si elle devenait loi dans les jours à venir, le budget alloué au « Electronic Government Fund » passerait de 34 millions de dollars en 2010 à 2 millions de dollars en 2011, ce qui ne permettrait pas de faire vivre le site datagov.

La Sunlight Foundation prend le risque au sérieux et a lancé sur son site une campagne pour sauver les données. Une mobilisation citoyenne est en cours et rappelle que les sommes engagées dans le portail d’offre de données représentent des économies par rapport au système du FOIA pre-existant et que le site est générateur de création d’emplois.

La bonne nouvelle étant que même si le site national fermait, les collectivités continueraient de maintenir leurs plateformes respectives. Mais difficile d’imaginer que les Etats-Unis puissent réellement envisager de fermer un projet phare de l’innovation et du gouvernement ouvert après en avoir été les leaders, d’ailleurs le président américain est prêt à opposer un veto sur cette décision.

  • Plateformes

L’Oregon lance sa plateforme de données sur Socrata

OpenMissouri ouvre ses données « pour les citoyens et journalistes »

Philadelphie prépare sa plateforme pour fin avril

CANADA

Ouverture de la plateforme de NiagaraFalls en beta et la plateforme de Halton

  • Montréal

Le groupe de travail opendata a été créé à Montréal (voir la video de la séance) et son rapport sur la thématique opendata est attendu pour la fin d’année 2011.

Retour sur les étapes : suite à sa création, Montréal Ouvert a eu deux rencontre publiques avec une soixantaine de personnes, a tenu deux hackathons permettant de démarrer de nouveaux projets et ce travail a permis d’aboutir le 22 mars 2011 à un mandat déposé par M. Applebaum, vice-président du comité exécutif de la Ville qui vise à analyser l’ouverture des données détenues par le ville. – Merci à Diane Mercier pour ses retours d’informations –

CHINE

L’opendata arrive en Chine, avec une première plateforme pilote pour Hong Kong.

ESTONIE

Le gouvernement estonien adopte des dispositions en faveur de la réutilisation de données publiques.

ESPAGNE

Téléchargements massifs autorisés par le cadastre espagnol depuis avril

Mise en ligne des plateformes de Castilla de la mancha et de Barcelone

ETUDES

ARTICLES

PROJETS

AGENDA

  • Le concours opendata européen jusqu’au 5 juin 2011

20 000€ de prix en jeu, participez en envoyant vos suggestions ou applications. Les gagnants seront annoncés en juin à Bruxelles.

Le site : http://opendatachallenge.org/

  • Conférence de l’Open Knowledge Fundation sur l’opendata le 30 juin

Plus d’informations sur les thématiques et inscription


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Le Premier Ministre François Fillon a officialisé la création d’Etalab, une mission interministérielle qui aura en charge la création d’une plateforme nationale de mise à disposition des données publiques de l’Etat.

« Le principe est de permettre un accès aux données brutes, il n’y a pas d’éditorialisation ou de communication du gouvernement sur ce portail. Il s’agit d’un site permettant l’accès et l’utilisation des informations publiques dans un souci de transparence. »

Tous les types de données publiques sont visés a priori, depuis les informations de géolocalisation jusqu’aux budgets votés.

 

Cette démarche est formalisée par un décret du 21 février qui nomme Séverin Naudet à la direction de l’équipe qui aura pour objectif de rattacher la France au groupe des Datagov. La plateforme nationale, dont on pourrait envisager le lancement fin 2011, sera d’ailleurs hébergée sous une joyeuse appellation franco-saxonne à l’adresse « data.gouv.fr ».

Ce projet attendu de longue date avait déjà été évoqué dans notre article sur le rapport Riester et nous avions fini par le nommer « l’arlésienne » tellement on en entendait parler, tellement il ne se passait rien. C’est donc une bonne nouvelle et les annonces officielles apportent quelques réponses à ces questions datant de l’année dernière. Quatre points sont à noter:

1. Une appellation qui pourrait faire référence

L’initiative d’Etalab est intéressante car elle va sans doute servir de base de développement aux prochaines plateformes et constitue donc un moyen d’harmoniser les pratiques.

Puisque Etalab a choisi le domaine data.gouv.fr, doit-on envisager des futurs noms de domaines type : data.ville.fr ? Ce qui arrangerait data.rennes mais risque d’ennuyer opendataparis.

2. L’administration créatrice de services

Etalab […] développera de nouveaux services en ligne

On en revient à la question débattue à Capcom entre Rennes et Regardscitoyens : L’administration a t-elle pour rôle de créer des services ou de faciliter un contexte de création externalisée ? Quels types de services relèvent de la responsabilité de l’administration ?

3. L’accueil des données des collectivités

Le décret nous apprend à l’article 2 que les collectivités pourront utiliser cette plateforme nationale pour y héberger leurs données.

Les exemples étrangers semblent pourtant justifier de la pertinence du système de répartition par niveau: données locales sur les plateformes locales, données nationales sur les plateformes nationales. Chaque possesseur de données gère sa propre plateforme ce qui facilite grandement la lisibilité.

Cette option destinée aux collectivités est-elle prévue pour faciliter leur passage vers l’opendata ? Pour leur éviter d’avoir à investir dans la création d’une plateforme ? Cependant d’autres initiatives nationales existent déjà pour héberger leurs données (nosdonnees ou data-publica) ou pour réutiliser des modèles de plateformes existantes et limiter ainsi les investissements de chacunes.

D’ailleurs, il est fort possible que les collectivités suivent le même raisonnement que pour la création de leurs sites internet en privilégiant une vitrine personnalisée et l’image forte qui y est associée. Sans compter l’effort sur la valorisation qui peut impliquer notamment l’animation d’une communauté, or difficile d’avoir un accès clair et une identité forte si les données locales sont noyées dans l’amas national.

Mais comme indiqué dans le décret, cet hébergement n’est qu’une possibilité en option.

4. L’absence de positionnement sur les licences

Etalab ne se positionne pas clairement sur la question des réutilisations commerciales: payant ou pas ? Le communiqué de presse indique qu’il y aura un « accès libre » aux données.  D’où notre question : « libre » as in free speech or as in free beer ?

Si les anglophones n’ont qu’un même mot pour dire « libre » et « gratuit »,  la langue française est riche du mot « gratuité », il est donc étonnant (ou pas?) de constater que le terme n’a pas été énoncé. Et encore là, il n’était question que d’accès, pas de réutilisation…

Mais certains acteurs semblent très au fait sur le positionnement d’Etalab,  Tel ce site de consulting qui indique :

« Etalab, la référence de l’opendata en France […] un site unique regroupant la totalité des données publiques disponibles et accessibles sous conditions aux “acteurs privés”. Ainsi l’État valorisera les données dont il dispose à travers la plateforme Etalab moyennant une redevance. »

Et de proposer leurs services aux collectivités pour organiser la vente de leurs données «la réutilisation pouvant parfaitement donner lieu à redevance »

Il faudrait quand même préciser à leurs futurs vict. clients que la loi n’autorise la vente qu’à hauteur du coût de mise à disposition de la donnée.

Avec ce genre de discours, il serait bon qu’Etalab précise son positionnement sur les licences. Le flou actuel a t-il pour objectif d’éviter les débats sur une question qui n’est pas encore tranchée en interne ? Ou doit-on y voir une réelle volonté de monnayer la réutilisation commerciale des données ?

PS : On attend également le correctif officiel de Nantes quant aux licences d’utilisation de leurs données. A notre connaissance rien n’est paru depuis que nous avons relayé leur message de malentendu mais si la voix officielle c’était libertic, nous indiquons que nous n’acceptons pas une rémunération sous forme d’intéressement sur les futures ventes de données 🙂

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